Extrait du Carnet Jaune

Printemps 2007

Tessa rentrait d’une bringue pas possible.. Elle était encore tout excitée de la soirée qu’elle venait de passer.. Elle avait dansé toute la nuit, abusé de ce cocktail délicieux.. Elle se déshabillait tout en marchant vers la salle de bain.. Pas grave, elle mettrait de l’ordre le lendemain.. Elle se laissa tomber sur le lit sans même défaire les draps et s’endormit sur cette délirante fatigue. Tessa était une jeune femme grande, élancée, sa chevelure longue et brune témoignait d’une belle féminité. Ses grands yeux verts offraient une profondeur sincère et gaie. Elle travaillait dans une agence immobilière et pouvait gérer son emploi du temps. Ce qui lui permettait de jouir pleinement de sa vie, même si parfois celle-ci avait un caractère superficiel. Tessa semblait attendre de la vie un déclencheur, se laissait vivre à espérer un changement, davantage en accord avec elle-même. Elle était désireuse de rencontrer son autre, sa moitié d’orange, comme disait sa grand-mère. Tessa se cherchait dans l’amour et ne parvenait pas à voir son chemin... Elle était en attente de quelque chose, au fond d’elle. Tessa pressentait un tournant proche dans son destin. Tessa sortit de son sommeil à cause d’une douleur aiguë à la tête. N’y tenant plus, elle se leva brusquement. Elle ne savait plus si elle sortait d’un cauchemar ou si elle était dans la réalité. Elle se dirigea vers les toilettes avec difficulté, s’empressait de prendre une douche comme si ce mal la mettait dans une certaine urgence... En se savonnant, elle sentait une douleur si insupportable au bras, qu’elle en lâcha la savonnette. Cette douleur physique lui demandait beaucoup d’effort, l’angoisse montait, elle ne comprenait pas la soudaineté de ce mal, surtout sa persistance. Tessa se frotta les mains puis elle les posa sur ses tempes quelques instants mais là, pour elle, ça ne fonctionnait pas. Elle avait de plus en plus mal, Tessa se perdait dans cette panique. Elle avait du mal à se concentrer sur ce qu’elle faisait. Elle se raisonnait, elle se disait « j’ai dû me faire mal hier soir, dans l’euphorie je n’ai pas dû me rendre compte de l’importance du coup, l’insistance de la douleur ne la rassurait pas. Elle décida d’aller aux urgences de l’hôpital. Le simple fait de tourner la clé dans la serrure de sa porte lui causait une telle difficulté physique que des larmes coulaient sur ses joues. Elle se hâta, comme si cet empressement allait mettre fin à cette souffrance... A ce moment-là, Tessa sentit la vie ! La peur s’emplissait d’elle, dans sa tête tout se bousculait... 

Que lui arrivait –il ? Après quelques heures dans la salle d’attente du CHU de Marseille, Tessa, qui était passée par toutes les phases d’angoisse et d’appréhension, était accueillie par un interne qui l’interrogeait pour établir un diagnostic. Dans un premier temps, elle devait subir quelques examens et radios avant de lui administrer un anti-douleur et de calmer cette intense souffrance. Elle rentrait chez elle. Après plusieurs heures passées dans le ballet incessant de blouses blanches, ce mal s'était adouci, elle oubliait un peu ses craintes interrogatives..  Elle verrait plus tard, quand elle aurait les résultats, dans deux jours..  Le lendemain, elle alla à l’agence où elle avait à faire. Ceci lui permettait d’occulter l’incident qui lui avait foutu une sacrée frousse..

  Enfin là, la parenthèse s’était refermée, elle avait d’autres choses en tête. Elle en saurait davantage plus tard. Tessa donna des appels téléphoniques, s’occupa des rendez-vous clients, s’offrait des tâches pour occuper son esprit, sa crainte et son mal de tête étaient latents. Elle repensait à cette soirée, à l’échange festif et insouciant avec ses copains.  Elle souriait en revoyant la fameuse scène de la grande « Lola » dans ce cabaret « gay et lesbien ». Lola avait gentiment « dragouillé » Bertrand qui, lui, avait su rentrer dans ce jeu de la séduction. Un grand moment de rire...  Lola avait su faire face à la dérision de l’instant...  Finalement elle ressentait aujourd’hui une certaine tristesse pour ce travesti qui, sous son déguisement, masquait sa vie. Il ne cherchait qu’une chose. Leur quête était finalement la même. Elle se plongeait dans l’importance soudaine de son existence et laissait sa pensée vagabonder dans cet univers...